- Les tarifs douaniers sont levés… La guerre commerciale mondiale connaît un nouveau rebondissement : un tribunal commercial américain a jugé illégaux les tarifs douaniers de Donald Trump, le président américain, et a ordonné leur annulation sous 10 jours. Les tarifs douaniers américains effectifs passeraient donc de 27 % le mois dernier à moins de 6 %.
- Le dollar est en hausse. En réaction, le dollar a grimpé, de même que les actions, le S&P500 étant en hausse de 1,6 %. Les conditions ont donc été réunies pour une hausse mensuelle de plus de 5 %.
- …puis réinstaurés. Moins de 24 heures plus tard, la Maison-Blanche a fait appel : une cour d’appel fédérale a temporairement suspendu la décision du tribunal commercial. Les tarifs douaniers restent donc en vigueur, en tout cas pour le moment.
- Le dollar est en baisse. Le dollar a subi une nouvelle pression à la vente, ce qui laisse penser que les traders souhaitaient s’aligner sur une tendance plus générale à la dédollarisation. Les investisseurs s’apprêtent à passer un été mouvementé.
- La réponse japonaise. Par ailleurs, l’enquête menée par le ministère des Finances du Japon laisse entrevoir une réduction des émissions, ce qui complexifie la dynamique des taux mondiaux. Les marchés obligataires japonais, britanniques et américains ont réagi positivement, ce qui s’est traduit par une hausse des prix et une baisse des rendements.
- Les rendements apportent un certain soulagement. Cela a mis un terme à la tendance à la vente des obligations, forcée par les investisseurs qui exigeaient de meilleurs rendements en prévision de la hausse de l’inflation et des dépenses publiques, conséquence des politiques en matière de commerce et de fiscalité de Donald Trump.
- Côté macroéconomique, la situation est mitigée. Le sentiment des consommateurs américains a connu sa plus forte hausse en quatre ans, mais reste globalement faible. Les demandes d’allocations chômage ont atteint leur plus haut niveau depuis 2021. Par ailleurs, le PIB au premier trimestre a bel et bien chuté de 0,2 %.

Macro mondiale
Des revirements de situation concernant les tarifs douaniers
Toujours plus de retournements de situation. Les dernières menaces liées aux tarifs douaniers proférées par Donald Trump à l’encontre d’Apple et de l’Europe ont pris les marchés de court. Cependant, dimanche dernier, Donald Trump a accepté de repousser la date limite au 9 juillet, suite à une conversation téléphonique avec Ursula von der Leyen, la présidente de la Commission européenne.
Remise en cause des tarifs douaniers. Jeudi dernier, la Cour du commerce international des États-Unis a jugé illégaux les tarifs douaniers de Donald Trump. Ont été concernés les tarifs douaniers liés au fentanyl et à l’immigration (10 à 30 %) en provenance de Chine, du Canada et du Mexique, ainsi que les tarifs sur les excédents commerciaux (10 % et plus). Les tarifs réciproques ont quant à eux été suspendus jusqu’au 9 juillet. En revanche, les tarifs douaniers appliqués à l’acier, à l’aluminium (25 %) ainsi qu’à l’automobile (y compris les pièces détachées) restent en vigueur. Le gouvernement américain a fait appel de cette décision, et l’affaire sera probablement portée devant la Cour suprême pour déterminer la légalité des tarifs douaniers basés sur l’IEEPA.
Les tarifs restent en vigueur… pour le moment. Une cour d’appel fédérale a toutefois accepté la demande de la Maison-Blanche de suspendre temporairement la décision du tribunal de compétence inférieure. La prochaine audience se tiendra le 5 juin.
Le marché obligataire japonais occupe le devant de la scène. Une enquête menée récemment par le ministère des Finances du Japon laisse entrevoir une éventuelle réduction des émissions, ce qui complexifie la dynamique des taux mondiaux. Par ailleurs, la Banque du Japon est en passe de normaliser sa politique, de mettre fin au contrôle de la courbe des taux et d’augmenter ses taux. Cela présente des risques pour les rendements américains, car les demandes de nouvelles émissions ne pourront pas être satisfaites. Les taux mondiaux sont à la baisse cette semaine. Toutefois, au vu de l’évolution du contexte, les obligations à long terme devraient rester élevées.
Données macroéconomiques mitigées. Le sentiment des consommateurs s’est amélioré pour la première fois depuis novembre : l’indice de confiance du Conference Board de mai affiche sa plus nette augmentation depuis quatre ans. Toutefois, à une échelle plus large, il reste relativement faible. Pendant ce temps, les demandes d’allocations chômage aux États-Unis ont atteint leur plus haut niveau depuis 2021, les ventes de logements en attente ont déçu et le PIB du premier trimestre 2025 a reculé de 0,2 %, légèrement en-deçà des attentes.

Perspectives sur le marché des changes
Vigueur du G10 grâce à la baisse du dollar
USD Le dollar, de moins en moins une valeur refuge. L’attrait du dollar américain en tant que valeur refuge baisse, à l’inverse des rendements et du VIX. Cela suggère que malgré la volatilité actuelle du marché, le DXY perd son attrait en tant que refuge, et que les rendements plus élevés sont insuffisants pour attirer les investisseurs. Cette situation se traduit par des sorties de capitaux des actifs américains. Neel Kashkari et John Williams, responsables de la Réserve fédérale américaine, ont renchéri cette semaine sur la position attentiste de la Fed, position encore renforcée par les comptes-rendus du FOMC. Il est peu probable que les taux soient baissés tant qu’il subsiste des doutes sur les tarifs douaniers et leurs conséquences sur l’inflation. Les commandes de biens durables aux États-Unis ont reculé de 6,3 % en avril, et la publication décevante du PIB (une baisse de 0,2 % en glissement trimestriel) a confirmé le sentiment pessimiste qui prévalait. Pour couronner le tout, le Tribunal de commerce international des États-Unis a statué mercredi soir que les tarifs douaniers du président américain Donald Trump étaient illégaux. Bien que cette décision puisse apporter un certain soutien au dollar, le moment où elle a été prise (c’est-à-dire la publication de données économiques faibles) a exacerbé les inquiétudes du marché. Le DXY est passé en-dessous de la barre des 99,5. Les conséquences futures de cette décision restent difficiles à prédire. Plus tôt dans la semaine, les bonnes nouvelles sur le plan commercial avaient stimulé le sentiment et suscité un certain optimisme quant à l’amélioration des politiques. Cette décision pourrait servir de catalyseur à des politiques plus favorables au marché, ce qui soutiendrait le dollar, ou à l’inverse, inciter Donald Trump à imposer des tarifs douaniers plus agressifs sur les secteurs non touchés.
EUR L’euro est en perte de vitesse. Malgré son statut de deuxième valeur la plus liquide derrière le dollar américain, l’euro a quelque peu ralenti ce mois-ci : la paire EUR/USD a reculé de 0,1 % et tourne autour des 1,14 $.L’optimisme concernant l’euro reste toutefois intact, d’autant que les propos de Christine Lagarde, la présidente de la BCE, au sujet d’un « moment mondial pour l’euro », ont renforcé le sentiment positif à l’égard de la monnaie unique. Néanmoins, les faibles ventes au détail en Allemagne en avril, les chiffres PMI décevants et un IPC plus faible que prévu en France soulignent l’absence d’un soutien macroéconomique intérieur solide à l’euro. La BCE maintient sa position accommodante et devrait baisser ses taux le 5 juin, privilégiant la croissance plutôt que l’inflation. Il s’agit désormais de savoir si les risques déflationnistes seront transitoires ou s’ils deviendront plus persistants. Cette situation influencera les futures décisions concernant les taux directeurs. Pour l’instant, les marchés anticipent une baisse des taux de 58 points de base de la part de la BCE contre 50 points de base de la part de la Fed pour l’année, ce qui renforce l’idée que les différentiels de taux à eux seuls devraient pousser la paire EUR/USD à la baisse à l’avantage du dollar. Toute nouvelle suppression des primes de risque du dollar (suite à l’apaisement des tensions commerciales et aux récentes décisions de justice) pourrait entraîner une baisse de la paire EUR/USD à court terme.

GBP Dynamisme à l’échelle locale. La livre sterling est en hausse de 7,6 % face au dollar depuis le début de l’année. Bien que cela s’explique en grande partie par la faiblesse du billet vert, elle présente un bêta plus faible par rapport au DXY, ce qui la distingue de nombreux paris du G10 et la rend moins réactive face aux baisses du dollar. Outre l’évolution du dollar, le sentiment à l’égard de la livre sterling s’est également nettement amélioré. Cela s’explique par les accords commerciaux avec le Royaume-Uni, aux données économiques nationales robustes et à la position relativement belliciste de la BoE. Ces facteurs renforcent la vigueur idiosyncratique de la livre sterling, faisant de sa hausse plus qu’une simple histoire de dollar. Bien que la paire GBP/USD soit passée de 1,36 à 1,34 $ cette semaine en raison de la hausse de la demande en dollars, la paire reste au-dessus de sa moyenne mobile sur 21 jours et d’autres moyennes mobiles à long terme, signe que la tendance à la hausse est toujours intacte pour le moment. Si l’on regarde les chiffres du mois, on constate que la paire de devises est en passe d’enregistrer sa quatrième hausse mensuelle consécutive, après avoir clôturé le mois dernier largement au-dessus de sa moyenne mobile sur 100 mois pour la quatrième fois en environ dix ans. Ces chiffres semblent indiquer une tendance haussière. Il est possible que la paire atteigne 1,40 $ dans les mois à venir, en particulier si les investisseurs recommencent à se débarrasser des actifs libellés en dollars dans un contexte d’inquiétudes persistantes vis-à-vis de la politique américaine. Par ailleurs, la paire GBP/EUR grimpe de 1,5 % depuis le début du mois et pourrait bientôt flirter avec la barre des 1,20 €, en grande partie grâce à l’élargissement des différentiels de taux et à la position commerciale privilégiée du Royaume-Uni avec les États-Unis.
CHF Le franc suisse est méfiant, la BNS s’apprête à prendre une décision. Malgré la décision liée aux tarifs douaniers et la hausse du marché boursier, la paire EUR/CHF ne dépasse pas les 0,94, ce qui illustre la méfiance croissante envers les bons du Trésor américain et les inquiétudes concernant les contraintes politiques de la Banque nationale suisse. Cela étant, la paire USD/CHF a augmenté de plus de 1 % la semaine dernière après avoir rebondi sur le seuil de soutien de 0,82. La BNS devra prendre une décision difficile avant sa réunion du 19 juin. Les marchés s’attendent à une baisse des taux de 25 ou 50 points de base. La BNS est réticente à revenir à des taux négatifs. Toutefois, elle n’aura sans doute pas le choix au vu des pressions économiques. Par ailleurs, les investisseurs s’attendent à ce que la BNS soit plus limitée dans ses interventions sur le marché des changes, conformément avec les directives de Washington. Reste à savoir si la BNS peut être suffisamment accommodante pour atténuer les risques de baisse de la paire EUR/CHF, surtout si la BCE procède à deux nouvelles baisses de taux.

